Nombre de photos de Salticides montrent nos sauteuses sur des fleurs. Certaines araignées, Thomises en tête, fréquentent les fleurs car celles-ci attirent les insectes et quoi de plus génial quand, de lui-même, votre repas vient se jeter sous vos chélicères.

Nos araignées sauteuses ne sont pas de ce genre, elles ont besoin d'espace afin de repérer leur proie, d'analyser si elle correspond aux critères gustatifs en vigueur, de calculer la distance qui sépare proie et chasseur. Pour elles, une fleur représente certainement un environnement trop réduit pour qu'elles puissent y pratiquer leur sport favori.

Force est de constater que les Salticides ne fréquentent qu'occasionnellement les fleurs. Et pourtant, les expos, les articles photos qui leur sont consacrés les montrent, dans la grande majorité des cas, sur des fleurs. On pourrait donc en conclure que, pour satisfaire aux volontés du photographe, elles sont capables d'aller poser sur un fond qui met leurs charmes en valeur.

N'allez surtout pas penser qu'un photographe, amoureux de nature, serait capable de les subtiliser, de les mettre dans un environnement plus approprié à la photographie, doté de conditions d'éclairage optimales, sans vent et sans possibilité pour nos modèles de s'échapper.

Je pense, comme j'essaie de l'expliquer dans Nat'Images, qu'une espèce est intéressante en soi mais aussi et surtout par le comportement qu'elle peut adopter, par son adaptation au milieu de vie. Il est navrant de constater que certains jonglent, sans jamais oser le dire, avec des sujets et des décors sans tenir compte du fait que la Nature a des droits et que ses amoureux se doivent de les respecter.

L'adjectif naturel n'est-il pas issu du mot nature ?

Que diriez-vous devant une photo de Baleine bleue sur fond de coquelicot et que penser de cette photo primée d'un loup sautant une barrière. Dans le premier cas que c'est un montage car jamais au grand jamais une telle photo n'est possible. Dans le second cas, il a fallu l'intervention de spécialistes pour dénoncer le côté artificiel d'une telle photo, un loup ne sautant pas un obstacle de lui-même.

Alors que dire d'une Marpissa muscosa photographiée sur une rose ? Pourquoi ce qui n'est pas acceptable d'un côté le serait-il de l'autre ?

Nos salticides sont-elles si moches qu'il faille les mettre en valeur de façon artificielle ?

Certains n'essaient même pas de mettre un nom sur leur sujet. Est-ce un acte égoïste, où l'on prend sans jamais redonner ? N'est-ce pas un manque de respect vis-à-vis de son modèle ?

S'il vous plaît, vous véhiculez de l'information à travers vos photos, alors allez jusqu'au bout de votre démarche. Des gens sont là pour vous y aider.

Au festival Festimages-Nature, une photo de Salticide dans une digitale a été récompensée, ce phénomène devient une mode.

Dernier rebondissement en date, un article de Marc Pihet dans le Nat'images N°32 de Juin-Juillet 2015.

Et ma réponse à la rédaction du journal, rédaction qui prône une éthique en matière de photo nature :

Je voudrais revenir sur l'article de Marc Pihet, paru dans Nat'images N°32.

Auriez-vous un double langage, d'un côté de beaux éditos pour partir en croisade contre la manipulation – et là j'applaudis à deux mains – et de l'autre une nécessité de remplir un magazine au risque de présenter des sujets qui contredisent lesdits éditos.

Votre combat s'arrête-t-il aux loups, aux batraciens et aux oiseaux ? Existe-t-il deux types de photographies animalières, celles qui illustrent l’animal dans son milieu naturel et celles qui nécessiteraient de le manipuler pour obtenir de meilleurs clichés, une discrimination faite en fonction de la taille ?

Si un photographe a besoin, pour magnifier ses clichés, de mettre ses sujets en évidence sur une superbe fleur, en l’occurrence un Pavot de… Californie comme c'est le cas ici, est-ce parce qu'il n’obtient pas de résultats satisfaisants lorsqu’il réalise ses photos sur le terrain ?

Pourquoi toujours vouloir enjoliver la nature, n’est-elle pas suffisamment belle ? C’est la respecter que de la décrire telle qu’elle est, sans lui imposer notre conception de l’esthétisme.

Comme je le répète inlassablement, n'oublions pas que, si une espèce est intéressante pour elle-même, son mode de vie et le milieu dans lequel elle se développe sont tout autant passionnants…

J'attends une réponse, sans trop d'espoir.

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